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Textes écrits pour laRadio
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CRITIQUES CINÉMA

EXTRAITES DE "PANORAMIQUE"
( émission diffusée sur TRIANGLE FM )

SALE SUCRE, d'Ang Lee ( Eat, Drink, Man, Woman )

Nouez votre serviette autour du coup et préparez vos baguettes! Car la cuisine occupe une place de choix dans le nouveau film d'Ang Lee, "Salé, Sucré". En effet la nourriture est le seul lien qui unit encore les membres de la famille à laquelle s'attache le réalisateur. La seule manière de communiquer entre un père, chef cuisinier dans un grand restaurant chinois, et ses trois filles aussi différentes les unes que les autres. Ang LEE, après "Garçon d'honneur", décrit à nouveau la complexité des relations parents-enfants et renouvelle le miracle de ce précédent film. Humour, émotion, nostalgie et tristesse s'entrecroisent autour de personnages attachants et pittoresques. Vous secouez un bon coup et vous obtenez un cocktail plutôt réussi, surprenant de sensibilité. Avec ce petit goût d’authenticité qui fait si souvent défaut dans bon nombre de films actuels. La cuisine chinoise, c'est, nous dit-on, 1'art de mélanger les différentes saveurs. Le cinéma d'Ang Lee, c'est du pareil au même. Son film est salé comme les larmes et sucré comme 1'amour et la tendresse. Merci donc à ce metteur en scène chinois de génie qui sait encore nous mettre 1'eau à la bouche. Et bon appétit!

 

LES SOLDATS DE L'ESPÉRANCE, de Roger Spottiswood
( And the Band played on )

"Philadelphia" et "Un Compagnon de longue date" évoquaient le cas d'individus confrontés à la maladie. Le film de Roger Spottiswood, "Les Soldats de l'Espérance", retrace l'histoire de la découverte de ce nouveau rétrovirus qu'on appellera bientôt le sida. Mais, contre toute attente, le film n'est pas une suite de considérations scientifiques, pas plus qu'un documentaire fastidieux. Il s'agit avant tout d'une terrible aventure humaine. Le film décrit, un peu à la manière d'un thriller, la progression des recherches, en s'attachant plus particulièrement aux médecins du CDC, un organisme gouvernemental américain chargé de répertorier les nouvelles maladies. Il aborde même de front la bataille franco-américaine - entre Max Gallo et Luc Montagnier - pour la paternité du virus, en prenant partie pour les Français. Une telle honnêteté n'est déjà pas si courante, mais en plus le réalisateur enfonce le clou en dénonçant les responsabilités du gouvernement Reagan, 1'inconscience des pouvoirs publics, des médias et des banques de sang. Ce qui nous ramène d'ailleurs à notre propre scandale de sang contaminé. Implacable, le film suit l'évolution de la maladie qui s’étend de la communauté gay à toutes les catégories d'individus sans distinction. Roger Spottiswood s'attache en quelques portraits rapides aux hommes et aux femmes qui luttent contre le fléau. Ce dosage habile entre 1'aspect scientifique du virus et I'humanité des personnages évite au film de tomber dans la froideur d'une description théorique. Et surtout permet d'impliquer le spectateur en lui montrant le drame humain que cette maladie engendre. "Les Soldats de l’Espérance" nous rappelle en effet que le sida, ce n'est pas simplement une question de chiffres et de statistiques qui font peur. Ce sont surtout des hommes et des femmes qui meurent chaque jour. Pour que le film se fasse, il a fallu le soutien de vedettes comme Richard Gere. Le projet a mis 5 ans avant de voir le jour. Sans doute parce que les financiers d'Hollywood ne se sentaient pas encore bien concernés par le sujet. Une raison de plus de croire ce film indispensable. Alors ne soyez pas découragés par le sujet ou par la longueur inhabituelle du film ( 2H20 ), et saluez la persévérance de tous ceux qui se sont battus pour qu'il existe, en allant le voir en salles.

 

UNDERGROUND, d’Emir Kusturica.

Après "Te Souviens-tu de Doly Bell"?, "Papa est en voyage d'affaires, "le Temps des Gitans" et "Arizona Dream", voila 1'occasion de retrouver le petit monde bien particulier d'un cinéaste marginal et original. Ses films sont chaque fois des moments de pur bonheur. Baroque, poétique, surréaliste, magique, cruel et drôle à la fois, l'univers d'Emir Kusturica se situe quelque part entre rêve et réalité. Son dernier opus, "Underground", Palme d'or à Cannes, confirme que ce cinéaste yougoslave couvert de prix depuis ses débuts n'a pas usurpé l'immense talent que lui reconnaissent les critiques et la profession. Son nouveau film se déroule sur près d'un demi-siècle : de la seconde guerre mondiale au conflit yougoslave actuel. 50 ans d'histoire yougoslave, 50 ans de guerre, d'amitié , de trahison, de manipulations, à travers le destin de 2 voyous, à la fois résistants et trafiquants, 2 amis qui aiment la même femme et dont la meilleure arme est sans nul doute leur aptitude au mensonge. "Underground" est une fresque incroyable qui entraîne le spectateur dans un tourbillon nostalgique fait de mort, de sexe, de comédie, de tragédie, de musiques et de fêtes. Un tourbillon de vie, tout simplement, cette vie propre qui anime d'ailleurs tous les personnages et les films d’Emir Kusturica. Une vie que l'on ressent à chaque image. Car le cinéma de Kusturica n'est pas fait de discours intellectuels, mais de sensations et d'émotions. Underground est un film séduisant, même dans sa folie, son hystérie fêtarde et ses excès. Car il met en scène des anti-héros qui sont avant tout des êtres humains. Aussi sont-ils ambigus à l'extrême. Souvent lâches, veules et cyniques, prêts à tout pour s'enrichir et exploiter les autres. Pourtant, le réalisateur a pris le parti d'en faire des êtres attachants. Il ne les méprise pas, montrant juste cette part d'humanité troublante qu'ils ont en eux. C'est peut-être parce qu'il ne les condamne pas que le film a été l'objet d'une controverse à Cannes. Chef-d'oeuvre pour les uns, propagande pro-serbe pour les autres. Mais qui a raison? La version qui sort en salle a été remontée. Je n'y ai vu pour ma part aucun discours pro-serbe. Certes, le film est aussi une métaphore sur l'obscurantisme du régime de Tito et les déceptions du communisme, mais il faut toujours se méfier des interprétations hâtives et définitives. A vous en tout cas de vous faire une opinion en découvrant ce film étonnant qui ne ressemble à aucun autre. Vous risquez fort d'être décontenancé à plus d'un titre.